links for 2008-03-14

Transmission du savoir

Tch13.I. Un jour, tandis que le duc Hoan de Ts’i lisait, assis dans la salle haute, le charron Pien travaillait à faire une roue dans la cour. Soudain, déposant son marteau et son ciseau, il monta les degrés, aborda le duc et lui demanda :
— Qu’est ce que vous lisez là ?
— Les paroles des Sages, répondit le duc.
— De Sages vivants ? demanda Pien.
— De Sages morts, dit le duc.
— Ah ! fit Pien, le détritus des anciens.
Irrité, le duc lui dit :
— Charron, de quoi te mêles-tu ? Dépêche-toi de te disculper, ou je te fais mettre à mort.
— Je vais me disculper en homme de mon métier, repartit le charron. Quand je fabrique une roue, si j’y vais doucement, le résultat sera faible ; si j’y vais fortement, le résultat sera massif ; si j’y vais, je ne sais pas comment, le résultat sera conforme à mon idéal, une bonne et belle roue ; je ne puis pas définir cette méthode ; c’est un truc qui ne peut s’exprimer ; tellement que je n’ai pas pu l’apprendre à mon fils, et que, à soixante-dix ans, pour avoir une bonne roue, il faut encore que je la fasse moi-même. Les anciens Sages défunts dont vous lisez les livres, ont-ils pu faire mieux que moi ? Ont-ils pu déposer, dans leurs écrits, leur truc, leur génie, ce qui faisait leur supériorité sur le vulgaire ? Sinon, les livres que vous lisez ne sont, comme j’ai dit, que le détritus des anciens, le déchet de leur esprit, lequel a cessé d’être.

Zhuang Zi (Tchouang-tseu), Œuvre complète, traduit par Léon Wieger, publié en 1913, retrieved from Wikisources 13 Mar 2008

links for 2008-03-13

links for 2008-03-11

links for 2008-03-09